Le bateau
Amzer’zo ( « On a le temps » ) est un cotre à corne construit en 1996 par Yvon Clochet à Plouguiel. Il s’inspire du plan de la Pauline du Dahouët mais avec une quête d’étambot plus prononcée. Il pratiquait la pêche et le pilotage mais aussi le cabotage et le goëmon.
Son gréement originel (au tiers) est celui d’un lougre : grand voile, misaine, hunier et foc sur bout dehors comme celui de la Pauline du Dahouët.
Ce gréement fut abandonné pour celui d’un cotre à corne : grand voile, flèche, trinquette et foc.
Caractéristiques
- Longueur hors-tout : 15 m
- Longueur de la coque : 10,30 m
- Longueur à la flottaison : 9,80 m
- Largeur maximale : 3,50 m
- Tirant d’eau maximal : 2 m
- Tirant d’air : 12,50 m
- Déplacement : 18 t
- Surface maxi de voilure : 96 m²
Eric Depoix, capitaine
Marin professionnel depuis 1997, j’ai navigué à bord de voiliers traditionnels depuis l’âge de 6 ans grâce à mon grand-père.
J’ai pratiqué de nombreux métiers comme ostréiculteur, marin à la pêche, marin en Marine Marchande, formateur en lycée professionnel maritime.
En 2007 j’ai fait l’acquisition d’Amzer’zo auprès de son concepteur et propriétaire historique, Yvon Clochet.
J’ai eu la chance de naviguer à bord de différents navires comme le trois mâts barque Belem, un sablier, un navire océanographique. J’ai commandé la bisquine la Cancalaise et un navire de ravitaillement de plateformes pétrolières.
En 2015, j’ai réarmé Amzer’zo en Marine Marchande, NUC (Navire à Utilisation Commerciale), afin de l’exploiter professionnellement pour des sorties d’apprentissage (formation à la voile traditionnelle non diplômante) et pour des visites commentées de la Baie de Morlaix.
Brevets Marine Marchande :
- Capitaine 500,
- Capitaine 200 voile,
- CGO (Certificat Général d’Opérateur radio),
- Qualification avancée à la lutte contre l’incendie,
- Médical III.
Je vous souhaite la bienvenue à bord !
Amzer’zo, ses usages, son histoire, sa construction
Réalisée entre 1992 et 1996 par Yvon Clochet, cette reconstruction est celle d’un voilier qui faisait la pêche et le pilotage en baie de Saint-Brieuc au siècle dernier.
Amzer’zo en quelques chiffres
- 10,30 m de coque,
- 15 m hors tout (toutes longueurs confondues),
- 3,50 m au maître bau (plus grande largeur),
- 2 m de tirant d’eau (plus grande distance verticale de la coque sous l’eau),
- 12,50 m de tirant d’air (plus grande distance verticale au dessus de l’eau),
- Il porte 96 m2 de toile,
- Il a un déplacement de 18 tonnes (poids du bateau).
Son déplacement est important pour un navire de 10,3 m car il a été construit comme à l’époque ; il est donc constitué de beaucoup de bois. En effet chaque pièce la charpente verticale (appelée membrure) est écarté de la suivante de 21 cm (c’est la maille) ce qui est très peu. Les membrures sont toutes doublées sur deux tiers de leur longueur depuis le fond et ont une épaisseur de 6 cm chacune soit 12 cm une fois doublées.
Un bateau puissant taillé pour la pêche
Les raisons de la solidité et de la rigidité de la coque viennent du fait qu’Amzer’zo était fait pour tracter des engins de pêche sur un bord seulement, il ne fallait donc pas qu’il se déforme à la traction et il ne fallait pas que les engins de pêche jouent le rôle d’ancre sur le fond : son poids lui donne l’inertie nécessaire pour tracter de manière uniforme les engins de pêche sans être arrêté dans son avancée.
La pêche
Amzer’zo pratiquait les arts traînants c’est à dire la drague et le chalut à bâton (ou à perche selon les ports).
Les dragues sont des cadres métalliques rectangulaires que l’on tracte verticalement sur le fond. De nombreux anneaux métalliques de petits diamètre sont reliés au cadre et forment un filet fermé à l’arrière du cadre. Le bas du cadre est constitué d’un couteau ou lame qui est un fer plat avec un angle permettant de « gratter » le fond.
A la traction le couteau sort du fond les coquilles saint-jacques ou les huîtres qui vont s’accumuler dans le filet et il suffit de remonter l’ensemble de l’engin de pêche et de le vider, au moyen d’un palan, pour récupérer le produit de la pêche.
Les pécheurs les utilisent encore de nos jours pour pêcher la coquille saint-jacques, les pétoncles, les huîtres d’élevage au sol, les crépidules ….
Le chalut à bâton était un filet fermé à son extrémité dont l’ouverture était maintenue béante par un bâton amarré au dessus. La flottabilité du bâton était assurée par des boules en verre car les flotteurs en caoutchouc n’existaient pas à l’époque. Le bas du chalut était lesté de pierres ou de plomb afin qu’il fasse sortir les poissons de fonds enfouis dans le sol.
L’ensemble était tracté sur le fond et pour récupérer le produit de la pêche il fallait relever l’engin et lever le fond du chalut au moyen d’un palan afin de le vider sur le pont et trier les différentes espèces capturées.
Ce chalut de petite taille n’existe plus aujourd’hui.
La technique de pêche consistait à aller sur le lieu de pêche dans le sens contraire du vent puis faire demi-tour et mettre l’engin de pêche à l’eau. Le trait (distance sur laquelle l’engin de pêche était tracté) se faisait dans le sens du vent en le prenant par l’arrière (meilleure allure le grand largue). Tout le travail de pêche se faisait à la main c’est pourquoi les pécheurs étaient au nombre de quatre à bords d’Amzer’zo. Ils ne tractaient qu’un engin de pêche à la fois et que sur un bord.
Un bateau à tout faire
Le pilotage
Le service de pilotage consiste à embarquer le pilote (personne physique) à bord des gros navires qui souhaitent entrer dans des ports, des rades, des estuaires …. dont l’accès est difficile.
Le pilote guide le capitaine pour l’aider à accoster. Le service de pilotage est obligatoire et payant.
Il s’effectuait autrefois avec des voiliers dédiés à ce travail dans les grands ports dont l’activité commerciale était intense.
A l’annonce de l’arrivée d’un grand voilier ou d’un vapeur l’ensemble de la flottille des bateaux pilotes disponibles appareillaient pour aller le rejoindre. Le premier arrivé avait le marché.
Dans les ports plus modestes comme ceux de la baie de Saint- Brieuc, le service de pilotage était effectué par un seul voilier qui n’était autre qu’un navire de pêche utilisé occasionnellement pour le pilotage et le reste du temps à la pêche.
Le service de pilotage existe encore et est réalisé aujourd’hui par des vedettes rapides – qui ne font plus la course pour être le premier sur les lieux.
Le cabotage
Les pêcheurs rentabilisaient leur voiliers au mieux tout au long de l’année et lorsque la pêche ne suffisait pas ils pouvaient être amenés à faire du cabotage ce qui consiste à transporter des marchandises d’un port à un autre. Autrefois les voiliers du type d’Amzer’zo n’étaient pas motorisés ils disposaient donc d’un volume de chargement en cale important ce qui favorisait l’activité de cabotage.
Conception et construction d’Amzer’zo
L’architecte naval François Vivier a réalisé le plan de la Pauline du Dahouët dans le but de reconstruire une unité traditionnelle de la baie de Saint-Brieuc dans le cadre du concours des bateaux des côtes de France organisé par le Chasse-Marée en 1992.
Yvon Clochet a construit quelques bateaux pour ce concours comme La Pauline, La Sainte-Jeanne d’Erquy et le Grand Léjon de Saint-Brieuc (qui a gagné le concours).
C’est après avoir réalisé ces bateaux qu’il a mit en chantier Amzer’zo pour se construire un bateau privé. Il l’a achevé en 1996 et en a été le propriétaire jusqu’en 2007 date à laquelle je l’ai acheté afin d’en faire un voilier professionnel.
Amzer’zo a été construit sur le modèle de la Pauline du Dahouët à deux détails près :
- La quête d’étambot (inclinaison de la partie arrière du bateau) est plus importante ce qui rend le tableau arrière plus fin et donne 90 cm de plus sur la longueur de coque.
- Le pont de franc bord (pont supérieur étanche) à été surélevé de 7 cm. La charpente verticale est inclinée sur l’arrière car elle est perpendiculaire à la quille (arrête centrale du bateau) ce qui est caractéristique des bateaux construit sur demi-coque.
Construction à l’ancienne
Autrefois les architectes navals ne dessinaient pas de petites unités de pêche ou de commerce, il n’y avait pas de plans pour ces bateaux.
Les charpentiers de marine utilisaient donc une demi-coque (qui sert aujourd’hui de décoration dans le salon).
- Ils empilaient des lames de bois d’épaisseur égale qu’ils chevillaient.
- Ils sculptaient la demi forme du bateau, au dixième, qu’ils voulaient construire puis ils traçaient des traits verticaux perpendiculaires aux lames de bois.
- Ils désolidarisaient les lames de bois et traçaient sur chacune d’elles des traits horizontaux, perpendiculaires à l’axe du bateau, à hauteur de chacun des traits verticaux précédemment tracés.
- Les traits verticaux représentaient la charpente verticale du bateau (membrures), qui étaient perpendiculaire à la lame de bois du bas qui représentait la quille (arrête centrale du bateau).
+ d’info ? Voir l’article de Chasse-Marée sur la technique de la demi-coque
Les voiliers de travail avaient une quille plus enfoncée dans l’eau à l’arrière qu’à l’avant elles étaient inclinées sur l’arrière et les membrures lui étant perpendiculaires, elles étaient inclinées sur l’arrière également.
C’est cette ancienne technique qu’a utilisé Yvon Clochet pour construire Amzer’zo.
La charpente et la coque d’Amzer’zo sont constituées de chêne, le pont et les bordés de pavois (haut du bateau) sont en sapin rouge, la mâture et les vergues (morceaux de bois qui soutiennent les voiles) sont en résineux pour la souplesse de l’ensemble.
Le gréement
Amzer’zo a été gréé en cotre à corne : un mât, une grand voile trapézoïdale (sur l’arrière du mât), un flèche triangulaire (haut dessus de la grand voile), une trinquette triangulaire (sur l’avant du mât) et un foc triangulaire (sur l’avant à l’extérieur du bateau).
Ce type de gréement est le fruit de l’évolution dans le temps de ces voiliers de travail. Les pêcheurs sont passés petit à petit du gréement de lougre (la Pauline du Dahouët) au gréement de cotre afin d’améliorer les performances de leurs voilier.
En effet un cotre à corne est plus performant lors d’un déplacement contre le vent.
Son gréement est constitué de 900 m de bouts (cordages) en polypropylène imitation chanvre pour la tenue dans le temps. Autrefois il était simplifié car il y avait quatre marins à bord. Il avait été gréé à la traditionnelle, par Yvon Clochet, ce qui imposait d’être deux à trois membres d’équipage pour le manœuvrer.
A son acquisition j’ai refais tout le gréement et démultiplié beaucoup de manœuvres pour pouvoir l’utiliser en solitaire.
Pour comparaison, autrefois à bord des cap-horniers les armateurs prévoyaient leur nombre de marins à raison de 160 m2 par homme, à bord d’Amzer’zo je suis à 96 m2 par homme.
Amzer’zo : un navire performant
Amzer’zo est un navire performant :
- Lorsqu’il se déplace dans le sens du vent, il est très puissant sous ces allures et peut atteindre la vitesse de 9 nœuds (environ 16,7 km/h) dans ces conditions.
- Lorsqu’il remonte au vent, lorsqu’il se déplace contre le vent il peut atteindre 4,5 nœuds (environ 8,3 km/h).
Soyez les bienvenus à bord,
Eric Depoix, capitaine d’Amzer’zo
Les autres bateaux cités dans cet article :
- La Pauline du Dahouët
- Le Grand Léjon du Légué
- La Sainte-Jeanne d’Erquy
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Vous y trouverez bien sûr Amzer’Zo